Renaissance
(Deux
filles -Lucie et Céleste- sont sur scène. Elles semblent être très
proche.)
Lucie : Depuis tant d’année on rêvait de se rencontrer. De se voir, en vrai !
Céleste
: Et maintenant c’est fait ! Je peux mourir en paix (rit)
Lucie
: (semble
un peu inquiète)
Bien
sûr que tu ne peux pas ! Ne plaisante pas avec ça.
Céleste
: Pardon, p’tite soeur.
Lucie
: (saute
de joie)
Je
rêvais de t’entendre dire ça en vrai ! En vrai, excepté avec ma
meilleure amie, être ta soeur de coeur est le seul titre qui me
tient à coeur !
Céleste
: (la
prend dans ses bras)
Merci,
sweetie. Merci pour tout. Et surtout, merci pour cette nuit-là.
Celle où je voulais tout laisser tomber.
Lucie
: Sept novembre 2017. Je m’en souviens.
Céleste
: Ce jour là, il y avait de l’orage…
Lucie
: Et Dieu sait que tu as peur de l’orage. Tu m’as envoyé un
message en pleurant sous ta couette.
Céleste
: Maintenant on en rigole, mais je faisais moins la maligne ce
jour-là.
Lucie
: Parce que tu étais vraiment, vraiment très triste.
Céleste
: Je m’étais disputée avec ma mère.
Lucie
: Tu te disputes souvent avec ta mère !
Céleste
: Oui, mais là, c’était horrible. Je lui en voulais d’avoir
détruit mes illusions. De traverser une crise de la quarantaine, et
de me montrer que tous les adultes passent par là.
Lucie
: Ouais, et toi, t’avais vraiment pas envie de passer par là.
Céleste
: Qu’est ce que j’avais dit déjà ?
Lucie
: “Lucie, honnête, je préfère avoir un accident à 17 ans que de
devenir une travailleuse blasée, avec son loyer à payer, ses gosse
qui lui trouent le cul et tellement de désillusions qu'elle
s'étouffe avec”
(Les
deux filles rigolent)
Céleste
: Bon, ça aussi, on en rigole aujourd’hui mais qu’est ce que je
pleurais cette nuit-là !
Lucie
: Tu te souviens de ce que j’ai répondu ?
Céleste
: “Viens avec nous parcourir le monde, alors”. Et puis tu m’as
dit à quel point tu tenais à moi, et à quel point passer par la
fenêtre était une solution de merde.
Lucie
: J’ai eu peur pour toi ce jour-là. J’ai cru que tu allais
vraiment te jeter par une fenêtre.
Céleste
: Sincèrement ? J’ai cru aussi. Mais ce soir là, je suis restée
pour toi. Et on s’est fait des dizaines de promesses, et c’était
magnifique !
Lucie
: Quelque chose a changé ce jour là.
Céleste
: Pour toi ?
Lucie
: Ouais. Ce jour là, moi j’ai compris que tu avais besoin de moi.
Comme c’est moi la petite soeur dans notre histoire, j’étais
sûre et certaine que j’étais la seule en position de faiblesse.
Mais cette fois-ci, pour la première fois, c’est toi qui me
confiait tes démons, et c’était à moi de te sauver. Je n’étais
pas habituée à ce rôle là, moi. Je me suis rendue compte que
j’étais utile, et nécessaire, pas seulement aimée. J’ai
réalisé que sans moi, tout aurait été différent. Et donc, que
j’étais obligée de rester.
Céleste
: (face
publique) Moi,
j’ai compris que vivre ça valait le coup. Qu’avancer était le
seul chemin. Que la vie était un jeu ou je pouvais gagner. Quand je
vois où j’en suis aujourd’hui, je me dis que rien n’a changé.
J’ai toujours peur de l’orage, et j’ai appris que l’on
n’arrête d’avoir le vertige que quand on se sent attiré par le
vide. Je suis toujours une enfant, un peu trop naïve, beaucoup trop
immature, beaucoup trop dramatique. Et puis je cligne des yeux, et je
regarde ma vie. Parce que finalement, beaucoup de choses ont changé.
Moi, j’ai changé. Je suis capable de me défendre, je me connais
mieux, j’ai moins peur. Je suis moins fragile aussi. J’ai
rencontré ma petite soeur de coeur en vrai. J’ai une petite amie,
maintenant, et je me sens prête à affronter le monde. J’ai envie
de vivre. Grâce à cette nuit là. Sept novembre 2017.
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